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S2 - Bonus - Le mariage de Louise (l'annonce)

Un premier bonus comme promis... Voici un épisode inconnu de la saison 2. Evoqué dans l'épilogue, je vous propose de retrouver en quelques posts, le mariage de Louise et Paul qui a eu lieu, selon l'histoire, en juin 1953. Pour commencer, je vous propose de découvrir l'annonce et ses soubresauts à la Borde Perdue. Bonne lecture !


Quand Paul avait proposé à Louise de l'épouser, au coeur de l'hiver 53, il avait fallu à la jeune femme du temps pour admettre que cet événement relevait d'une réalité bien tangible. Son destin prenait un virage qu'elle n'aurait jamais osé espérer et elle osait à peine savourer le bonheur que cette perspective lui procurait.

Paul était attentionné, apportait enfin de la douceur à ses jours qui en avaient tant manqué, une affection réparatrice à sa destinée qui avait été jusque là tellement rugueuse.

Le projet de cette union avait mûri lentement et lorsque les platanes de la place de Florac avaient lâché leurs pousses vert tendre, le village tout entier bruissait des épousailles de l'instituteur et de l'une de ceux de la Borde Perdue.

Louise, lorsqu'elle y pensait, n'en revenait pas. Le sentiment qu'elle éprouvait pour Paul avait grandi jusqu'à prendre une place essentielle dans sa vie. A tel point qu'elle n'aurait jamais cru une telle intensité possible. Force était de constater que cela lui donnait des ailes.


Au début du printemps, elle avait demandé une journée à Angelin qui la lui avait accordée sans difficulté, elle avait pris l'autocar jusqu'à Revel pour rejoindre Hélène installée désormais dans la Montagne Noire chez Baptistine et Augustin.

Elle dut attendre lorsqu'elle y arriva et cette attente eut pour effet de l'impressionner.. En effet, sous les arbres sombres et près des murs, assis sur des chaises de campagne brinquebalantes qui n'auraient pas pleuré devant la visite d'un rempailleur, des patients attendaient leur tour.

Il y en avait sept peut-être huit et sous le frais soleil du printemps. D'aucuns déplaçaient leur chaise pour se réchauffer aux frêles rayons, d'autres au contraire cherchaient l'ombre sous les arbres.

Les conversations étaient murmurées et s'interrompaient dès que Baptistine ou Hélène raccompagnaient un visiteur sur le perron. "Portez-vous bien." lui murmuraient-elles avant de demander "C'est à qui ?".

Les onguents, les tisanes aux plantes et les secrets de guérison des deux femmes était très appréciés. Et la réputation de leurs bienfaits s'était répandue vers la vallée revéloise comme un éboulis de pierres calcaires, de schiste ou de grès dans la montagne. Au marché du samedi matin, on vantait leur savoir-faire en arguant du soulagement de tel ou telle.


Vers midi, une accalmie intervint enfin et Hélène lorsqu'elle referma la porte derrière le dernier de ses patients, murmura comme l'aurait fait un enfant :


— Tantine !


Hélène rayonnait. Sa nouvelle vie auprès de Baptistine et Augustin la comblait. Sous sa robe, son ventre arrondi témoignait de ses amours passées avec Marcel. Elle n'en avait plus eu de nouvelles mais se sentait apaisée et préparait sereinement l'arrivée du bébé. Comme on s'en doute, la nouvelle avait fait grand bruit quelques mois plus tôt à la Borde Perdue lorsqu'elle était venue l'annoncer.


— Que vont dire les gens ? avait réagi Elia.

Mal mai esser un de mai que non pas un de mens ! * avait commenté Juliette sobrement.


Et puis, le temps avait fait son oeuvre et chacun avait intégré la nouvelle. Hélène et Louise, ce jour là, n'évoquèrent pas cette annonce faite à la famille.


— Car pour une fois c'est de toi dont on va parler Tante Louise ! s'exclama la jeune fille en riant.


Et Louise se laissa aller comme jamais à raconter son bonheur tout neuf, sa nouvelle vie et les peurs presque superstitieuses qu'elle nourrissait de voir le destin capricieux lui voler tout, d'un coup.


— Ne pense pas à des choses pareilles, s'offusqua Hélène.


Louise évoqua aussi le mariage qu'elle ne pouvait envisager sans la présence de Hélène. Elle parlait d cette journée avec une gourmandise presque enfantine.


— Avant-dernier samedi de juin ? Je te le promets, je serai là, Tantine, s'enthousiasma-t-elle.





Léonce, lui, rouspéta lorsqu'il apprit la date, quelque part au début du mois de mai 1953.Comme à son habitude, il maugréa, pesta dans sa barbe, s'en trouva scandalisé d'abord à voix basse puis de façon plus tonitruante.


— De toute façon tu roumègues tout le temps.

— Mais enfin Elia, ça n'a pas de sens. Au mois de juin, nous serons en plein dans les foins et presque à la moisson. Quelle idée saugrenue... C'est bien un mariage d'instituteur ça.

— Ils t'auraient fait choisir la date que tu te serais arrangé à la fin pour ne pas la trouver à ton goût. Avec toi, rien ne va jamais bien.

— Mais enfin, ce n'est pas parce que je touche la retraite vieillesse que j'ai perdu mes réflexes de chef d'exploitation. En juin, on a du travail par dessus la tête ce n'est pas à toi que je vais l'apprendre... Germain, je le connais, n'osera rien leur dire.

— Mais que veux-tu qu'il dise ? Pour une fois, pour une fois dans ta vie, Léonce, tu peux bien...

— ça va demander une organisation pas possible. Vous irez et puis, tiens, eh be moi je resterai avec les bêtes et tout le travail qui me débordera ! Vous, vous ferez la fête et moi je serai seul, là, épuisé, à ne savoir où donner de la tête !


La porte de la chambre du fond s'entrebâilla et Solange passa une tête.


— Est-ce que vous pourriez chuchoter s'il vous plaît ? Les petits viennent de s'endormir et je ne voudrais pas..., murmura-t-elle à voix basse.


Solange et Germain étaient les parents depuis quelques mois de jumeaux et le silence relatif de la borde n'était pas toujours aidant pour le sommeil d'Eloi et Jean-Marie, nourrissons de leur état.

Derrière Solange, des pleurs s'élevèrent soudain. Un peu exaspérée, elle referma la porte.


— Et voilà, tu es content ! s'égosilla Elia dans un chuchotement éraillé.

— Ah ben, celle-là, c'est la meilleure. Ce n'est pas moi qui ai...


Mais la colère de Léonce ne dura pas, elle fondit jusqu'à s'éteindre même lors d'une visite de Louise.

Elle était venue avec Paul inviter officiellement la famille Bourrel. Le bonheur donnait aux deux amoureux un rayonnement particulier, Louise était transfigurée.


Son polits quicon ! murmura Juliette en souriant depuis le coin du feu qu'elle quittait de moins en moins.

Le reste de la famille était installé autour de la table, un petit verre de vin avait été servi à chacun.


Gabriel affichait une moue de gamin comme s'il essayait de dissimuler la déception liée au fait que sa tante lui échappât définitivement. Germain, un bébé dans les bras, ne levait pas les yeux et tâchait ne pas croiser le regard de Louise. Leur vécu commun, face à cette situation, le mettait mal l'aise. Il éprouvait une gêne. Une gêne qui n'avait sans doute pas lieu d'être mais une gêne qui était pourtant là, bien installée, à cet instant précis.


Il la surmonta au bout d'un moment lorsqu'il dit, dans un souffle :


— Bien sûr que nous serons là, Louise. Il ne peut en être autrement. Nous nous organiserons pour la métairie, je ne sais pas encore comment mais nous serons là. C'est important. Pour toi. Et pour nous.

— Merci.


Elle hésita ensuite laissant le silence s'inviter au milieu d'eux.


— J'avais également une demande un peu spéciale, osa-t-elle au bout d'un temps.


Tous les yeux la fixèrent soudain.


— C'est à vous Léonce que je voudrais faire cette demande. Un peu particulière...


Paul posa sa main sur la sienne comme pour l'encourager.


— Vous êtes ma famille. Plus un seul des miens ne vit aujourd'hui... Ce que vous avez fait pour moi en me recueillant est...


L'émotion l'étranglait un peu. Sa voix se faisait souffle soudain.


— Léonce, j'ai pensé à vous pour... Est-ce que vous accepteriez de m'accompagner jusqu'à l'autel. Je suis sûr que mon père serait heureux que ce soit vous.

— Oh Louise... répondit simplement Léonce dont les yeux se mouillèrent instantanément.


Il fouilla nerveusement son gilet puis sa veste, accrochée au dossier de sa chaise, avant de trouver enfin son mouchoir froissé dans la poche de son pantalon.


— Léonce, je sais que papa approuverait mon choix. Il avait tant d'amitié pour vous.


Léonce éclata alors en gros sanglots bruyants qui disaient toute l'approbation du monde quant à la proposition de Louise.

Suite à cela, il ne fut plus question de la date du mariage mal positionnée à la borde. Il remisa sa mauvaise humeur jusqu'à l'oublier. Léonce tirait de l'honneur que lui faisait Louise une grande fierté au sujet de laquelle il s'épanchait à la première occasion et notamment au café Baptiste à Florac lorsqu'il y buvait un Ambassadeur ou une Suze qui l'aidait à deviser joyeusement.


A suivre...

Bientôt la suite du Mariage de Louise à découvrir ici


La 19 avril, le feuilleton "Ceux de la Borde Perdue" paraîtra aux éditions Il Est Midi. Le livre sera disponible chez votre libraire et les plateformes habituelles . Encore un peu de patience... Plus de détails à venir... Renseignements mail/contact : contact@bordeperdue.fr




En attendant vous pourrez retrouver ici quelques bonus, portraits des personnages, histoires inédites, anecdotes, moment de travail à la borde d'autrefois à un rythme de publication plus aléatoire. N'hésitez pas à vous abonner (formulaire tout en bas de la page d'accueil du site) pour en être prévenus.


A bientôt,

Sébastien


Retrouvez l'ensemble des épisodes parus dans l'onglet "Blog" du site : https://www.bordeperdue.fr/blog



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